La Madone noire

Juste devant le capitaine se trouvait un portrait de fille noire, jeune et rondelette. Elle portait une robe bleue imprimée d’où émergeaient ses épaules nues et douces. Elle portait sur son dos un enfant maintenu dans une bande d’étoffe rouge. Le visage tourné vers le capitaine, elle souriait.
« C’est Nadya, balbutia le capitaine. Nadya… » Il gémit. Il regarda l’enfant noir, et ferma les yeux. Il les rouvrit. La mère et l’enfant n’avaient pas bougé. Michele trçait avec beaucoup de soins de fins cercles jaunes autour des têtes de la fille noire et de son enfant.
« Bonté divine, s’exclama le capitaine, vous ne pouvez pas faire cela !
– Pourquoi donc ?
– Vous ne pouvez pas faire une madone noire.
– C’était une paysanne. Voici une paysanne. Une madone paysanne noire pour un pays noir.
– Mais c’est un village allemand, rétorqua le capitaine.
– C’est ma madone, déclara Michele rageusement. Votre village allemand, et ma madone. Je peins ce portrait en offrance à la madone. Elle est très contente – je le sens. »